Fiche du témoin

Daniel Grandener

Daniel Grandener a embarqué comme mousse pour sa première campagne de pêche à bord du Varne. C’était pendant les fêtes de Noël, le bateau était ancien, la mer mauvaise…En débarquant, il s’est promis de ne plus réembarquer ! Daniel est quand même resté 6 ans à la pêche avant de quitter le métier de marin qu’il avait appris à aimer et qu’il évoque volontiers...

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Travail à bord de l’Angoumois

Je n’ai passé qu’une courte période sur l’Angoumois, j’ai fait deux marées de quinze jours. A bord, l’équipage s’entendait assez bien, on travaillait comme un seul homme. Tout le monde participait parce que notre salaire en dépendait. Je suis ensuite retourné sur les chalutiers classiques parce que, pour avoir une place sur un bateau comme l’Angoumois, il fallait comme on dit « tuer quelqu’un ». En effet, les gens qui avaient leur place, ils souhaitaient la garder parce que c’était de bons bateaux. Je crois même que l’Angoumois a été cordon bleu. J’ai malgré tout réussi à faire un remplacement sur l’Angoumois et un autre sur le Valois. Ca m’a fait plaisir : on gagnait un peu plus d’argent et c’était l’occasion de connaître des bateaux plus modernes. Pendant la journée, on mettait en pêche, on virait, on ramassait le poisson, on l’étripait, on le lavait, on le glaçait. Ensuite, on réparait les filets s’il y avait besoin de les réparer. Notre vie était rythmée comme ça. Il y avait aussi les moments de repas, à onze heures le matin je crois, et le soir à 6 heures. On disait « à la soupe, on mange !! ». Parfois, on avait à peine les pieds sous la table que ça cassait, donc on mangeait avec un lance-pierre. Quand j’étais sur un bateau qui avait un poste d’équipage à l’avant et que ça nous arrivait, on retournait vite dans le poste d’équipage prendre un quignon de pain, manger pendant qu’on virait les câbles, mais ça n’était pas facile. En mer, à part quelquefois l’été, on ne quittait pas souvent ses bottes, son ciré, son pantalon. Quand il fallait virer, il y avait toujours un danger parce que le treuil était actionné par une commande manuelle et s’arrêtait plus ou moins doucement. Il ne fallait pas que le câble casse. Après, il fallait tirer le filet et le ramender. Sur les classiques, le roulis et la fatigue rendaient le métier encore plus difficile. On ne travaillait pas huit heures, avec ensuite une pause de douze heures à la maison. Je pense que la pêche c’est un métier particulier. Ce qui motivait les gens, c’est qu’il n’y avait pas de salaire minimum. Le salaire, c’était ce qu’on ramenait à terre comme poisson, et encore fallait-il une bonne vente à la criée.

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