Fiche du témoin
Daniel Grandener
Daniel Grandener a embarqué comme mousse pour sa première campagne de pêche à bord du Varne. C’était pendant les fêtes de Noël, le bateau était ancien, la mer mauvaise…En débarquant, il s’est promis de ne plus réembarquer ! Daniel est quand même resté 6 ans à la pêche avant de quitter le métier de marin qu’il avait appris à aimer et qu’il évoque volontiers...
Indépendance financière
Au retour de marée, le patron donnait la paye à mon père. A l’époque, on était 10 à la maison et mon père gagnait un salaire de misère. Il était manœuvre sur les bateaux. Il piquait la rouille, peignait les bateaux, les sablait, il faut reconnaître que c’était un travail très difficile. Tous les jours, mon père allait travailler en vélo d’Aytré jusqu’à La Pallice. La voiture c’était bien, mais il fallait mettre de l’essence. Jusqu’à 18 ans, il prenait ma paye. Il me disait «va chercher ta paye !», je la prenais mais pour la lui donner. Le poisson de la godaille, il le prenait aussi. J’arrivais quand même à en garder une partie pour le vendre et avoir un peu de sous. Je trouvais ça difficile parce que je passais 15 jours environ en mer pour 3 jours à terre et je n’avais pratiquement pas d’argent. D’un autre côté, je me disais que c’était normal, parce qu’il y avait ma famille derrière. Mais, à 18 ans, quand il m’a dit « je prends la moitié de ta paye» alors j’ai dit « je m’en vais » et je suis parti. Je fréquentais, ça tenait bien, ça ne pouvait plus continuer comme ça. Mon frère aussi naviguait et c’était pareil, il était soumis au même régime. J’ai donc dit « c’est bon, je m’en vais vivre ma vie ». Ca ne voulait pas dire que je ne m’entendais plus avec ma famille, ça n’a rien à voir, c’est juste qu’à un moment donné, on veut se séparer. Les séparations, ça passe par avoir son autonomie et avoir pleinement les moyens de vivre. Quand je suis parti, je me suis installé chez ma sœur qui habitait un peu plus loin, à Aytré. A 19 ans, je me suis marié et j’ai vécu chez la grand-mère qui avait élevé ma femme. Ensuite, je suis parti habiter à Villeneuve les Salines qui était construction en 71. Avant que je sois marié, c’est mon père qui venait m’attendre sur le quai. Il venait me chercher et je conduisais la voiture, sans avoir le permis, entre mes 16 ans et mes 18 ans. Sans la nommer, la conduite accompagnée existait déjà !