Fiche du témoin
Daniel Bertrand
Daniel Bertrand, est originaire de La Rochelle. Il a navigué sur les chalutiers industriels, mousse à 13 ans et demi pour devenir patron en 1974. Il a ensuite navigué au commerce avant de revenir à la pêche chez les franco-espagnols. Il a été patron sur l’Angoumois.
Daniel Bertrand, patron sur l’Angoumois
Entretien avec Yves Gaubert
Daniel Bertrand, est originaire de La Rochelle. Il a navigué sur les chalutiers industriels, mousse à 13,5 ans pour devenir patron en 1974. Il a ensuite navigué au commerce avant de revenir à la pêche chez les franco-espagnols. Il a été patron sur l’Angoumois.
J’ai commencé la pêche en 62 à 13,5 ans. J’étais à l’école des mousses. Je me suis embarqué sur le Marie Vincent le 20 décembre 62. Je suis originaire de La Rochelle. Mon grand père était marin, il a fait Terre Neuve. Mais mon père n’était pas marin. Au départ, je ne voulais pas l’être, J’ai été reçu au lycée technique, mais je n’avais pas de bourse, alors je suis rentré à l’EAM.
J’ai navigué sur le Languedoc, le Pactole, les classiques, chez Frédérique en premier, puis Castaing, Dahl, un peu tous les armements. Il y avait des places partout. On nous donnait notre sac ou on le prenait. Frédérique avait douze bateaux. J’ai été à l’école de lieutenant. Je me suis marié en décembre 70 quand je préparais le lieutenant.
Je suis parti sur le Clapotis avec Maurice Garet ; c’est lu qui m’a forgé. J’ai eu une dérogation pour commander le bateau. Je me souviens d’une tempête. Le 12 février 72 à 7 h du matin, le bateau a chaviré, le chalut était pris en dessous. Le chalut tirait le bateau, on était dans l’eau. On est sorti, fallait dévisser les cônes, le bateau s’est redressé. On a été porté disparu deux jours. On était rendu à Rochebonne. On faisait route pêche, le chalut était sur le côté retenu par des pieux. Dans le coup de gîte, le chalut est sorti des pieux et tombé à l’eau.
On avait des cônes, des sphères qui servaient à écarter le chalut. C’est un engrenage d’erreurs qui entraîne l’accident. Le bateau est resté deux mois en réparation ; tout l’arrière du bateau était cassé. La radio ne marchait plus, on ne pouvait plus communiquer. C’était un bateau de l’armement Onfroy. J’étais lieutenant, le patron c’était Maurice Garet
Je suis parti sur le Terequi une semaine après. J’ai passé le patron de pêche à Concarneau. J’ai fait 15 jours d’école et je me suis présenté comme candidat libre. Mon patron de pêche je l’ai eu en 74.
J’ai commandé l’Angoumois pendant 5 ans, en remplacement, quand Joseph Pouillon restait à terre. Quand ils ont désarmé l’Angoumois, je suis reparti avec lui sur le Force 17 en 87. Ce bateau a eu un accident, le moteur a explosé. Il a été désarmé puis a été mis à La Pallice à pourrir. Le Flandres, le Gascogne, l’Antioche et l’Angoumois, c’était la même série de chalutiers. Le Force 17, il fallait pas avoir peur, sa coque c’était du papier à cigarette. Dès qu’on tapait un petit peu, ça résonnait. Un jour, j’ai rentré le Force 17 sans barre à La Rochelle. Je l’ai emmené à la criée au poste 5 en crabe.
A bord, j’ai quand même gagné ma vie. J’ai commandé deux ans le Clapotis. L’équipage le mieux c’était sur l’Angoumois. James Pain était mon bosco. Quand j’étais jeune patron, j’ai eu tendance à me faire monter sur les pieds. Il faut pas dire peut être, il faut dire sûr, il faut prendre des décisions. On travaillait à Porcupine, Blasket, le trou à merde, 55 ° nord 12 ° ouest. Celui qui passait le premier c’était le pactole.
On cherchait le merlu et la dorade, mais on prenait ce qu’il y avait/. Le colin, c’est tout juste si on le remettait pas à l’eau, maintenant il coûte cher. L’Angoumois reste un souvenir du bassin des chalutiers, mais il aurait fallu garder un classique. J’ai navigué sur le Magayant avec Roget, c’est le dernier bateau que j’ai fait à La Rochelle en remplacement. J’ai navigué chez Mancell aussi.
Mon meilleur souvenir, c’est quand j’ai emmené ma femme faire un voyage quand je naviguais au commerce. J’ai fait du dragage dans le canal de Suez.
Mon surnom, c’était Johnny. Je ressemblais à Johnny, peut être.
Après le Force 17, il fallait que je me refasse une santé, je suis parti au commerce. J’ai fait le Brésil, J’ai terminé à Vigo chez les franco-espagnols, sur un bateau français immatriculé à Bayonne. J’ai fait 5 ans sur le Magdeleine. J’étais patron de route, puis j’ai été patron de pêche sur le Battant, le second qui s’occupait du pont était espagnol, les autres étaient portugais. J’ai arrêté il y a trois ans. J’ai 41 ans de navigation. A 55 ans on vous arrête. J’ai un bon souvenir des franco espagnols, c’est eux qui m’appelaient quand ils avaient besoin de moi.
Photos : Daniel Bertrand en 1964 © Daniel Bertrand
L'Angoumois rentrant au port © Christian Lhéoté